iPad : on parle déjà de la fin du papier

Alors que LeMonde.fr propose un long article sur les espoirs qui se cristallisent autour de l’arrivée de l’iPad en France, au Canada, la société Power Corporation, éditeur de plusieurs titres de presse (papier et internet) a évoqué la disparition « peut-être lointaine » de la version papier de certains d’entre eux.

L’avenir de la tablette d’Apple n’est pas encore parfaitement défini : e-book, e-BD,e-magazine ou TV portable dédiée à la Vod (Vidéo à la demande), outil de navigation ou PC d’appoint, cartable numérique ou console de jeux ? Tout ça à la fois ? Difficile à dire même si on peut déjà avancer que dans cette 1ère version, la tablette d’Apple semble être un appareil de consommation plus que de création.

Les contenus et applications qui viendront enrichir et personnaliser l’expérience de l’iPad seront déterminantes. Pourtant, comme je le rappelais dans ce billet, certains secteurs, à l’avenir incertain, attendent beaucoup (trop ?) de la tablette made in Cupertino : « c’est notre bouée de sauvetage » assurait Frantz-Olivier Giesbert (Directeur du Point) devant ses pairs en mars dernier.

La presse (quotidienne, magazine, généraliste ou spécialisée) se verrait bien rebondir grâce à l’iPad (et ses concurrents qui seront bien une quinzaine) mais le pari est loin d’être gagné. Car si la tablette connaît déjà un grand succès (1 millions de ventes en moins d’un mois aux Etats-Unis), son ergonomie, sa puissance et l’usage qui en découlent réclament des contenus innovants tant sur la forme que sur le fond. Et si Le Monde.fr rappelle que « la division numérique du New York Times compte environ 150 ingénieurs et techniciens », c’est pour préciser que la presse française ne finance, elle, aucun service de R&D (recherche et développement) dans ce domaine !

Il va pourtant bien falloir que les éditeurs proposent des contenus innovants, bien différents de ce qui se fait dans le monde physique. Se contenter de convertir un magazine en PDF pour en tourner les pages sur un iPad risque de tourner à la catastrophe industrielle… Il va falloir réunir des qualités ludiques, magiques,… révolutionnaires… Surtout que ces mêmes contenus auront aussi l’opportunité de justifier des abonnements payants. Et là aussi, il va falloir jouer serré. Même si les éditeurs jouent le jeu de l’innovation (nouveaux contenus, nouvelle ergonomie, nouvelle expérience du lecteur,…), le prix sera déterminant. Si des offres groupées (abonnement papier + Web + iPad ou Web + iPad ou papier + iPad,…) et originales voire expérimentales ne viennent pas casser un schéma vieux de 100 ans (kiosque ou abonnement) et des grilles de tarifs qui n’ont plus rien à voir avec les réalités contemporaines (le web a imposé la gratuité partielle ou totale, les offres freemium,…) alors, je ne donne pas cher des titres les moins engagés dans l’ère numérique… Pourtant, en même temps, si ces tarifs sont des usines à gaz, ça ne marchera pas non plus !

L’arrivée de l’iPad va-elle faire disparaître le papier ? A terme oui. L’éditeur GESCA (éditeur canadien de journaux, magazines et livres) vient d’y faire allusion sans tabou. Le tout est de savoir à quel horizon. Dans les nouvelles technos, ce genre de question est récurrente : Faut-il changer radicalement de modèle pour coller rapidement aux nouveaux usages et risquer de tout perdre ou vaut-il mieux financer plusieurs types de distributions au risque cette fois que le second modèle cannibalise le 1er ? Le secteur de la musique a eu à faire ce choix, le secteur du cinéma doit également le faire, celui de l’édition (livres, journaux, magazines) est en pleine réflexion et expérimentation. Tout le commerce physique expérimente aujourd’hui la distribution physique et numérique : de la chaussure au voyage, des services bancaires à l’alimentation.

Quel que soit le domaine, l’essentiel est évidemment de ne pas négliger voire dénigrer un modèle dont l’émergence est évidente. L’industrie musicale a expérimenté la chose : Les Majors ont, pendant des années, refusé catégoriquement l’existence du MP3 ! Ces mêmes Majors ont ensuite freiné des quatre fers le développement des plate-formes numériques (iTunes, Virgin, Fnac.fr,…). L’industrie cinématographique a de son côté favorisé la vente de DVD au détriment d’une Vod (Vidéo à la demande), toujours anémique malgré les efforts de certains distributeurs (CanaPlay, TF1 Vidéo, Free,…) pour être présents au plus près des consommateurs : sous la TV (Box ADSL,…) et bientôt dans la TV elle-même…

Les éditeurs ont beaucoup appris des ces expériences. Alors vont-ils éviter les écueils de la révolution numériques ? Vont-ils l’accepter et se donner les moyens de coller aux nouveaux usages ? L’industrie musicale a tenté de lutter contre la mutation de son secteur (Mp3, achat de morceaux à l’unité, le partage, l’explosion du Live,…), idem pour la vente par correspondance (La Redoute, Les 3 Suisses,…) et d’autres. Les éditeurs vont devoir faire mieux. Si les éditeurs n’en ont pas les moyens financiers, il va leur falloir ruser. L’initiative du Figaro est d’ailleurs assez intéressante de ce point de vue. Le journal vient en effet de signer un partenariat avec… iTélé ! La tablette, comme un PC classique, permettant de consommer tout type de contenus (texte, vidéos, animations, sons), le partenariat permettra au Figaro.fr d’enrichir ses articles de séquences audiovisuelles. Un concept assez magique sur l’iPad.

Sources

L’iPad, planche de salut pour Gutenberg (LeMonde.fr / 8 min de lecture)

Cyberpresse pourrait devenir payant (Canoe.com / 1 min de lecture)

iPad : la presse française peaufine ses contenus

Il y a quelques jours, Apple annonçait la sortie imminente de sa tablette, l’iPad(début avril aux E-U, un mois plus tard en Europe). Ce nouvel appareil qui servira autant de navigateur internet que d’eBook reader notamment (lire ce billet pour plus de détails) est une formidable opportunité pour la presse. Celle-ci pourra enfin légitimer des contenus numériques payants en créant une version iPad (ou tablette) de ses titres quotidiens, mensuels,… régionaux ou nationaux. Un moyen aussi de « relancer » ses Marques aujourd’hui totalement noyées dans les contenus illimités de Google News et des autres agrégateurs d’information.

Une légitimation possible qu’à travers l’innovation. Si L’Equipe, Voici, GEO, Le Monde, Le Figaro, Libération et d’autres ont évoqué une version spécifique de leur titre pour l’iPad, il ne suffira cependant pas d’en offrir une simple adaptation des versions pdf ou internet ! Je suis convaincu que le pari peut être gagné à condition que les « journaux iPad » aient une personnalité qui colle aux nouveaux usages tant sur le fond que sur la forme. Les journaux vont devoir proposer des contenus innovants, alliant texte, animation, 3D, Photos 360°, pom, vidéo, son, etc. Et tout ça à travers une interface tactile qui induit de nouvelles logiques dans le rapport homme-machine.

Et du côté de l’innovation, autant j’ai été impressionné par la démonstration (vidéo ci-dessous) effectuée autour du New York Times lors de la keynote de présentation (y’avait un côté journal d’Harry Potter assez magique) autant je suis littéralement scotché par la démonstation récente du journal WIRED ! Ce titre américain, certes spécialisé dans les nouvelles technologies, est ce que j’ai vu de mieux en terme de « journal tactile ». C’est clair : Wired veut changer le rapport que le lecteur entretient avec le journalisme ! La démo vidéo présentée ci-dessous réunit certainement tous les atouts de Wired sur iPad et il n’est pas certain de retrouver toutes ces fonctionnalités tant éditoriales que publicitaires lors de sa commercialisation dans moins d’un mois. Mais le ton est donné ! Tout ça ne fait que confirmer mon avis sur l’iPad et les tablettes en général.

La démonstration de Wired est en anglais mais souvent les images parlent d’elles-même…

La démo du NYT lors de la présentation de l’iPad aux journalistes (plus de démo dans ce billet)

D’autres informations à la Source (2 min de lecture)

MAJ 18 mars 2010 : Voici une belle initiative de contenus magazines entièrement habillés pour l’iPad. L’animation est ultra-léchée. C’est beau, ludique même si je préfère le potentiel de lecture non-linéaire de Wired pour iPad (voir plus haut). Comme le précise Mac4ever, le coût d’un tel habillage devrait dans un premier temps, rendre l’expérience assez rare dans la réalité. Regardez.

Les vidéos Vodpod ne sont plus disponibles.